La pair-aidance connaît une dynamique sans précédent en Auvergne Rhône-Alpes, une région pionnière où la diversité des territoires façonne des approches multiples. Certains départements se démarquent par l’ampleur de leurs dispositifs, l’innovation de leurs projets, ou la mobilisation de réseaux locaux. Mais l’engagement ne se limite pas au nombre d’initiatives : il s’appuie sur la reconnaissance institutionnelle, la formation, et la capacité des pairs à agir dans les structures de soins, le médico-social ou les dispositifs citoyenneté et santé.
Selon un recensement régional du CREAI Auvergne Rhône-Alpes (mai 2023), près de 185 postes ou missions de pair-aidance sont aujourd’hui identifiés dans la région, couvrant des réalités très contrastées. Quels territoires font figure de locomotive, et pourquoi ? Sur quels leviers s’appuient-ils ? Cette mise en perspective vise à donner des clés pour comprendre les dynamiques en cours et inspirer d’autres lieux.
C’est sans surprise dans le département du Rhône, principalement sur la métropole lyonnaise, que l’on observe la plus forte densité d’équipes intégrant des pair-aidants. L’effet « tête de réseau » y joue à plein :
Cette vitalité s’explique aussi par le soutien affirmé des institutions de santé mentale, la présence universitaire (Laboratoire DIPHE Université Lyon 2), et le rôle des associations militantes telles que l’AFTOC, ARPSY, UNAFAM et le collectif PsyMajeur69. La Métropole soutient plusieurs appels à projets permettant d’embaucher ou de former des pairs.
Le département de l’Isère s’illustre par une démarche partenariale originale et pluridisciplinaire. À Grenoble et dans sa périphérie, on compte aujourd’hui :
L’innovation se mesure par des collaborations avec des acteurs comme la Mission Locale Jeunes ou l’intégration de pairs dans les dispositifs « Logement d’abord » et Habitat Inclusif. L’implication des familles et des proches, notamment via le réseau UNAFAM 38, renforce la dynamique locale et le maillage des structures.
Encore peu visibles il y a 5 ans, la Savoie et la Haute-Savoie avancent vite :
La spécificité ici est l’accent mis sur le lien social et l’ancrage local, permettant de toucher des personnes isolées ou peu enclines à solliciter les structures traditionnelles. La coopération très forte entre associations d’usagers, structures d’insertion et collectivités donne à ces territoires une capacité d’innovation notable.
La Drôme et l’Ardèche constituent un cas d’école de développement de la pair-aidance hors des grandes agglomérations :
On observe une forte implication citoyenne et un ancrage dans les solidarités rurales, permettant la diffusion de la pair-aidance y compris auprès des agriculteurs, artisans, ou habitants isolés.
Si Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) et Saint-Étienne (Loire) étaient autrefois moins moteurs dans le développement régional, les lignes bougent :
Ce développement s’appuie largement sur un engagement militant, dans un contexte de précarité accrue en santé mentale. Certaines faiblesses subsistent néanmoins, notamment en termes de formation et de pérennisation des postes, thème national signalé par le collectif national pour l’emploi pair-aidant.
Partout dans la région, les territoires les plus engagés ont su répondre à trois grands enjeux :
Les territoires ruraux expérimentent des formes d’itinérance ou de pair-aidance de proximité, quand les grandes agglomérations développent davantage des filières de formation et des dispositifs structurés, proches d’une professionnalisation (Rapport ANCREAI, 2023).
L’avenir se joue autant dans la promotion de la connaissance partagée (évaluation, restitution, diffusion des bonnes pratiques) que dans le soutien des institutions à des modèles économiques stables et inclusifs.
Des ressources régionales et nationales offrent un aperçu précis de la vivacité de ces expérimentations :
Le tissu de la pair-aidance est dense, pluriel, et en constante évolution sur l’ensemble du territoire régional. La région Auvergne Rhône-Alpes compte aujourd’hui plus de 185 dispositifs actifs, dont 75% ont ouvert entre 2018 et 2023 (source : CREAI). Cette croissance rapide s’appuie autant sur l’effort militant que sur la structuration institutionnelle : un gage de vitalité, mais aussi de défis à relever collectivement.
Échanger, se rencontrer et mutualiser sont les moteurs pour généraliser la reconnaissance et la présence des pairs sur tous les territoires. Des réseaux comme le Réseau Pair-aidance Lyon Rhône-Alpes ou la Plateforme Pairs Isère organisent régulièrement des rencontres ouvertes aux personnes concernées, familles, élus locaux et professionnels, afin de partager outils, parcours de formation et retours d’expérience.
Que l’on soit usager en rétablissement, professionnel du soin, proche ou militant local, il existe aujourd’hui en Auvergne Rhône-Alpes une ressource ou une équipe à portée de main. C’est par la coopération que la pair-aidance continuera de grandir, à l’image de ces territoires qui, chacun à sa manière, incarnent un espoir de solidarité concrète et durable.